Les décrets venant préciser les seuils des facteurs de pénibilité, publiés le 31 décembre 2015, ont permis aux entreprises de s’atteler plus sereinement à l’évaluation des risques liés à la pénibilité. Le dispositif actuel laisse libre choix aux employeurs de baser leur évaluation de la pénibilité sur un travail de mesure interne, ou bien de suivre le référentiel établi par sa branche professionnelle. Deux méthodes d’évaluation, parfois complémentaires, qui présentent chacune leurs avantages et leurs inconvénients. Qu’est-ce qu’implique une évaluation individuelle ou collective (via un référentiel de branche) ?
L’évaluation collective via un accord de branche
L’employeur peut opter pour une « évaluation collective » de la pénibilité, sur la base d’un accord de branche, proposant un modèle indicatif d’ordre méthodologique et non impératif. Les branches professionnelles travaillent actuellement à l’élaboration de ces accords[i] pour proposer aux entreprises des référentiels homologués par le COCT (Conseil d’Orientation pour les Conditions de Travail[ii]). Rappelons que toute entreprise de plus de 50 salariés, ou appartenant à un groupe de plus de 50 salariés, dont 50% des effectifs est exposé à au moins un facteur pénibilité, est dans l’obligation de négocier un accord sur la pénibilité.
L’application d’un référentiel de branche pour l’évaluation de la pénibilité apporte une sécurité juridique à l’employeur. On considéra en effet qu’il est de « bonne foi » dans ses déclarations à partir du moment où il est lié à un accord de branche et qu’il utilise le référentiel de sa branche professionnelle.
Par ailleurs, l’employeur ne sera pas redevable de majorations de retard ou de pénalités financières en cas de contentieux avec un salarié.
Toutefois, le document unique relève de la responsabilité de l’employeur d’assurer la sécurité et de protéger la santé des salariés. Depuis 2002 l’employeur est tenu à une obligation de sécurité de résultats en vertu du contrat de travail qui le lie à ses salariés. Cette obligation a été affirmé par la Cours de Cassation sur le fondement de l’article L. 41 21–2 du Code du travail, texte qui impose l’évaluation des risques et l’établissement d’un document unique. En cas de contentieux, le document unique reste le référentiel dont dispose la justice afin de vérifier la bonne identification du risque, son évaluation, la prévention envisager et après enquête de terrain, la prévention effective. Dès lors, le chef d’entreprise peut être condamné pour une insuffisance d’analyse.
Enfin, notons que cette option oblige également, l’employeur à cotiser pour le compte de pénibilité même s’il n’a pas d’employé dépassant les seuils de pénibilité au sein de sa structure.
L’évaluation individuelle
L’employeur peut également opter pour une évaluation individuelle en utilisant sa propre méthode d’évaluation des risques de pénibilité. Il peut faire appel à un expert interne ou externe à l’entreprise afin réaliser un diagnostic préalable de pénibilité et pour mesurer le dépassement des seuils en prenant en compte les mesures de prévention mise en place par l’entreprise concernée.
Cette option demande à l’employeur de réaliser un travail d’analyse des risques liés à la pénibilité et de mesure de dépassement des seuils, qui sera, certes plus complexe, mais indéniablement plus représentatif des situations de travail réelles.
L’employeur pourra valoriser, dans son diagnostic, la mise en œuvre des mesures de prévention et ainsi limiter sa cotisation pénibilité.
En cas de contestation d’un salarié, c’est la Jurisprudence qui sera en charge d’évaluer le cas, soit en se référant aux directives de la branche, soit en considérant le cas comme particulier.
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[i] L’accord de branche est une négociation paritaire, réalisée entre les représentants des salariés et le patronat.
[ii] Ce conseil est constitué de représentants du ministère du travail, de représentants des affaires sociales, de représentants des organisations professionnelles et d’experts comme l’ANACT, l’INRS, etc.)