Dans la foulée de l’ANI (accord national trouvé par les partenaires sociaux), le sujet de la santé au travail va être traité par l’Assemblée nationale. Une proposition de loi pour « renforcer la prévention en santé au travail”, portée par les députées LREM Charlotte Parmentier-Lecocq et Carole Grandjean, a été adoptée par la commission des Affaires sociales de l’Assemblée Nationale, le10 février.
Transposer dans la loi l’accord national interprofessionnel (ANI) trouvé par les partenaires sociaux
De nombreux acteurs de la prévention des risques professionnels estiment qu’une réforme du système français de santé au travail est devenue nécessaire. Les approches actuelles montrent leurs limites dans la prévention de la désinsertion professionnelle, dans la prise en charge des maladies chroniques… Plutôt que de poursuivre avec ces mécanismes de “réparation” à la suite d’un accident du travail, la proposition de loi oriente vers une logique de « prévention primaire » en matière de santé au travail.
Ce texte s’articule autour de 3 ambitions :
- Faire de la santé au travail, et de la prévention des risques professionnels, un axe prioritaire des politiques publiques.
- Garantir à tous les travailleurs un accès rapide et de qualité aux services de santé au travail,
- Renforcer les moyens d’accès et de maintien dans l’emploi des travailleurs les plus vulnérables.
Redimensionnement du document unique
Pour prévenir les risques liés à l’activité professionnelle, le texte inscrit dans la loi le document unique d’évaluation des risques professionnels (le DUERP). Ce document “répertorie l’ensemble des risques professionnels auxquels sont exposés les travailleurs” au cours de leur carrière. Le DU devient la base d’un plan de traçabilité collective des expositions professionnelles et d’action de prévention de l’entrepris.
En cas de changement d’entreprise, et donc de mise à jour du document, toutes les versions doivent être conservées pour pouvoir retracer les risques auxquels ont été exposés le travailleur.
Alerter sur les risques de désinsertion professionnelle
Dans l’objectif de “mieux accompagner certains publics, notamment vulnérables” ou en situation de handicap, le projet de loi prévoit qu’au sein des services de prévention et de santé au travail, une cellule soit dédiée à la prévention de la désinsertion professionnelle. L’article 19 de la proposition de loi leur permet de profiter du dispositif de transition professionnelle via le CPF, sans condition d’ancienneté.
Création d’un passeport prévention
La création d’un passeport prévention pour chaque salarié et apprenti listerait toutes les formations suivies et les certifications obtenues par le travailleur en matière de sécurité et de prévention des risques professionnels. Ce passeport attesterait de l’organisation, par chaque branche ou chaque entreprise, d’un module de formation de base sur la prévention des risques professionnels.
Prise en charge les travailleurs non-salariés et les chefs d’entreprise
Il s’agit ici d’une avancée majeure en matière de prévention et de santé au travail. Un article de la proposition de loi étend le suivi des travailleurs par les services de prévention et de santé au travail aux intérimaires, aux salariés d’entreprises sous-traitantes ou prestataires de l’entreprise utilisatrice ou donneuse d’ordre. Les travailleurs indépendants et chefs d’entreprise non salariés pourront également profiter d’un tel suivi.
Une visite médicale de mi-carrière
L’article 16 de la proposition de loi met en place une visite de mi-carrière professionnelle, qui sera réalisée à 45 ans. Le but est de réaliser un état des lieux, pour vérifier l’adéquation entre le poste de travail et l’état de santé du salarié. Au terme de cette visite, le médecin du travail aura la faculté de proposer, si besoin, des mesures individuelles d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail ou des mesures d’aménagement du temps de travail.
Le retour d’un salarié après une longue absence
Des études ont montré que globalement, la reprise du travail après une longue absence liée à la maladie est mal accompagnée par les entreprises. La proposition de loi entend améliorer les conditions de retour d’un congé de longue durée. Elle prévoit notamment d’organiser une visite de reprise avec le médecin du travail après un congé maternité ou une absence de longue durée liée à la maladie ou à un accident du travail.
Le texte crée un rendez-vous de liaison, qui permettra à l’employeur, au salarié, au médecin conseil et au service de prévention et de santé au travail, de mieux préparer les conditions de ce retour.
Collaboration entre la médecine du travail et la médecine de ville
Le texte vise à renforcer la coopération entre la médecine de ville et la médecine du travail. Un article modifie ainsi le code de la santé publique, pour permettre aux médecins et infirmiers du travail d’accéder, après accord du travailleur, à son dossier medical. Réciproquement, un autre article de la proposition de loi ouvre le dossier médical en santé au travail (DMST) aux médecins et professionnels de santé “de ville”, en charge du diagnostic et du soin du patient, toujours si ce dernier donne son accord.
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